Défendons nos lycées et nos salaires ! 18 octobre tou.te.s en grève

« On aura bientôt plus d’essence pour la clio »

 

Rapide revue de presse ce matin : « la France est paralysée parce qu’une poignée de salariés de Total, manipulé par Martinez, grand manitou de la CGT, bloque les raffineries, et ainsi, à terme, toute l’activité économique du pays. Les salariés des raffineries touchent des salaires de dingue, plus de 2000 euros, presque 3000! Leur employeur leur a lâché 6 ou 7% d’augmentation plus de juteuses primes et pourtant ils bloquent encore, les ingrats, l’accès à leur boîte. Une poignée d’emmerdeurs privilégiés et jusqu’au boutistes. La CFDT, syndicat majoritaire dans la boîte, a signé les accords salariaux. Berger est un type raisonnable. Pourtant les mêmes qui ont donné au syndicat CFDT de la boîte la majorité lors des dernières élections professionnelles, poursuivent la grève. Ils ont cessé d’être raisonnables. Sur plusieurs des quelques centrales nucléaires qui fonctionnent encore c’est la même chose : la CGT a lancé un mouvement de grève. Si les français se les gèlent cet hiver ça sera sa faute. On tient le coupable. L’envie de vomir arrive juste après ce topo déjà bien écœurant. On est pourtant sur une radio de service public. La journaliste annonce malicieusement son prochain invité. Elle est manifestement très fière du parallèle qu’elle s’apprête à faire. Son invité mystère revendique une augmentation des salaires de 10% pour tous les travailleurs du pays. Mais attention ce n’est pas Martinez de la CGT précise-t-elle, c’est Sébastien Chenu, du Rassemblement National. L’amalgame aussi finement suggéré ne tiendra pas longtemps : Chenu transpire la haine dès qu’il s’agit de causer de la CGT. Au bout d’une minute d’interview il lui crache dessus et hurle avec les loups. »

Réveil matinal difficile ce samedi 15 octobre 2022.

La situation est la suivante :

Le gouvernement a décidé les réquisitions de quelques travailleurs des raffineries. Le droit de grève, pourtant un des plus élevé dans la hiérarchie des normes juridiques, est aboli depuis mercredi. Ca n’est pas la première fois dans l’histoire récente. Il y a un précédent « Sarkozy ».
La France avait été pointée du doigt par l’Organisation Internationale du Travail (OIT, vieille et noble institution créée au lendemain de la première guerre mondiale). Ca recommence. Le droit de grève est, de fait, non plus un droit sacré, intouchable, constitutionnel, mais un droit dont l’exercice est conditionné : un travailleur a le droit de faire grève s’il ne dérange personne. Les fonctionnaires de l’Education Nationale sont au courant : eux, ils peuvent faire grève, ça ne dérange personne. C’est peut-être pour ça qu’ils ne la font pas ou peu, au regard de la destruction de leur outil de travail, de leurs salaires, les plus bas de l’OCDE, de l’effondrement de leurs métiers. Ainsi, la grève pour dénoncer la nouvelle et énième réforme de la voie professionnelle, journée d’action programmée au mardi 18 octobre, est tout à fait permise par le gouvernement. Elle est symboliquement importante, cela ne fait aucun doute. Mais voilà que vient de se greffer un autre sens sur cette journée de grève programmée depuis longtemps.

Toute la CGT, c’est à dire, toutes les fédérations donc tous les secteurs professionnels, mais aussi toutes les Unions Départementales, donc les territoires, appellent à la grève ce mardi 18 octobre 2022. Parmi les UD, bien sûr, celle du Cantal qui a voté l’envoi d’une motion par chaque syndicat à l’adresse de la préfecture (voir pièce jointe).

Une grève interpro et intersyndicale (Sud, la FSU et FO ont rejoint cet appel) mardi 18 octobre 2022, pourquoi ?

Pas seulement donc pour dénoncer la casse du service public d’enseignement professionnel même s’il faut garder ça à l’esprit. L’actualité sociale nous a rattrapés. Ce mardi 18 octobre 2022 il s’agira, de se positionner sur la question de nos droits fondamentaux : si les travailleurs-ses de ce pays ne bougent pas, de fait, ils acceptent qu’on leur retire le droit sacré de faire grève.

L’intoxiation médiatique ne doit pas dissimuler ce fait à nos yeux : si nous ne sommes pas en grève mardi 18 octobre, nous acceptons, en tant que travailleurs-ses, le déclassement juridique du droit de grève. Et si le
gouvernement ose la généralisation des réquisitions qu’il a entreprises depuis mercredi sans que les travailleurs ne bronchent, il faudra s’attendre à d’autres reculs juridiques de première importance. Pourquoi se gêner ? Si cela
ne suffit pas pour cesser le travail mardi prochain, il n’est pas inutile d’en remettre une petite couche sur le sens des blocages des raffineries de l’hexagone. Certes nous n’aurons bientôt plus de gasoil ou d’essence à mettre
dans les réservoirs gourmands de nos véhicules -espérons-le – lesquels nous permettent surtout d’aller au travail tous les matins. C’est pour pouvoir aller au boulot tous les jours que les français râlent aux stations service.

Mais justement comment va mon travail qui me fait haïr ces emmerdeurs cégétistes quand j’attends à la pompe? Est-il bien rémunéré, à hauteur des efforts que je lui consens tous les jours ? Est-il bien agréable à faire,
ce travail, avec de bien bonnes conditions de travail, est-il bien épanouissant, en suis-je bien fier, et est-ce que j’y trouve, au delà du salaire, ce fameux sentiment d’utilité, ce fameux sens, qui me fait l’aimer ? Est- ce que j’aime mon travail pour lequel je fais la queue à la station service ? Et les bloqueurs de raffinerie qu’est-ce qu’ils pensent de leur boulot ? Bien rémunéré ? Bien agréable ?

Ils revendiquent quand même deux, trois trucs.

Les travailleurs des raffineries demandent à leur employeur qu’il aligne leur salaire sur le taux de l’inflation. 

Un paramètre important qui légitime de surcroît cette revendication, est le fait bien connu des profits colossaux de Total sur l’année précédente, et aussi, paramètre anecdotique mais symboliquement saisissant, le fait que le patron de cette entreprise a bénéficié d’une augmentation salariale exclusive de 50%.

Le mépris est palpable, évident, incontestable.

Parmi les deux trois trucs qu’ils demandent il y a ça : juste un peu de respect.

Tout ceci, les médias le chuchotent, mais au milieu d’un brouhaha savamment orchestré qui finit par le rendre inaudible, par le faire passer à l’arrière plan, alors que c’est là l’essentiel.

Ce qu’il s’agit surtout de soustraire à l’attention des travailleurs, c’est le sens politique général de la grève des travailleurs des raffineries. Ces derniers revendiquent ce que tous les travailleurs sont en droit de demander au regard de la situation sociale générale. Le partage équitable des richesses n’est jamais prévu par une organisation du travail de type capitaliste sans quoi elle ne serait précisément plus capitaliste.

Tout travailleur, pour peu qu’il parvienne à mettre à distance les discours médiatiques suspectes, ainsi que les urgences de son quotidien (y a plus d’essence pour la clio) peut comprendre que la grève des raffineries est emblématique d’une injustice salariale qui les touche aussi. Il y a un effet miroir potentiel, redouté par le gouvernement.

Le mépris salarial est un problème élémentaire de justice sociale. Il est du même ordre que le mépris des métiers, qui s’incarne dans les réformes qui s’abattent sur notre institution scolaire, et, au-delà, sur tous les métiers, qu’ils relèvent du privé ou du public. C’est un mépris de classe. 
C’est un mépris de notre travail. C’est un mépris des travailleurs que nous sommes. Parmi les deux trois trucs que nous aussi nous avons à demander mardi 18 octobre, il y a ça : juste un peu de respect.

La CGT Educ’action du Cantal appelle donc tous les
personnels de l’Education Nationale à ne pas travailler ce mardi 18 octobre.

CGT Éduc'action Clermont-Ferrand