Blanquer confirmé, réformes accélérées
Cette rentrée scolaire ne ressemble à aucune autre : effets du confinement et conditions sanitaires incertaines sur les apprentissages, fracture numérique qui a contribué à aggraver les inégalités sociales.
Le confinement a aussi mis en lumière les problèmes d’équipement informatique pour les personnels comme pour les élèves et a confirmé que l’état du bâti scolaire n’était pas à la hauteur des enjeux.
Le ministre s’est fixé comme priorité de développer les évaluations standardisées, alors que celles-ci existent déjà et ont fait la preuve de leur inefficacité.
Cette obsession est en décalage complet avec les exigences de cette rentrée. Rien ne semble prêt du côté du gouvernement. Le ministre s’est contenté d’assouplir le protocole sanitaire et de communiquer sur les médias qu’il fréquente avec assiduité.
Pour préparer une rentrée dans différentes configurations, il faut revoir la constitution des classes, penser l’organisation de l’établissement, il faut aussi prévoir la diminution des effectifs dans les classes pour des raisons sanitaires pour permettre de travailler en petits groupes. Pour cela, il faut des moyens supplémentaires. Après l’octroi de dotations supplémentaires d’emplois (insuffisants) pour le premier degré, il faut également des moyens en plus pour le second degré.
Dans un tel contexte, la suppression de 440 postes d’enseignant·es dans le 2nd degré, alors qu’il faudra accueillir 30 000 élèves supplémentaires est inadmissible. La crise à laquelle nous sommes confronté·es exige davantage de professeur·es, de CPE et de PsyEN, de personnels ATSS et AEd-AESH pour accueillir, accompagner et permettre la réussite de toutes et tous.
Le gouvernement doit prévoir l’ouverture de postes aux concours de recrutement afin de pourvoir ces nouveaux postes. Le ministre se targue de dialoguer avec les organisations syndicales, mais il n’a tenu aucun compte de cette demande syndicale quasi unanime.
Il traite la rentrée sans prendre la mesure du défi éducatif qu’elle représente et sans mettre les moyens, forcément exceptionnels, qui sont nécessaires.
Dans les établissements, la rentrée se fera sans consignes particulières. Une fois de plus, derrière les discours médiatiques, le ministre laisse les personnels seuls pour assurer et faire fonctionner le service public d’éducation.
Les chantiers sont nombreux pour faire de l’École d’après une École à la hauteur des enjeux éducatifs : les moyens, les salaires, les contre-réformes, les équipements…
La CGT Éduc’action sera là pour le rappeler au ministre.
Voie pro : la lutte contre le décrochage n’est pas d’actualité
Après une première année de mise en place de la «transformation de la voie professionnelle» marquée comme l’ensemble de l’Éducation par la crise sanitaire de la Covid-19, c’est dans un climat tout aussi incertain que s’ouvre cette nouvelle année scolaire.
Aux antipodes de la demande d’un plan d’urgence pour la voie pro par la CGT Éduc’action et l’intersyndicale nationale, le ministre a publié en plein cœur de l’été, la circulaire de rentrée et un protocole sanitaire qui ne répondent ni aux attentes des personnels, ni au bilan catastrophique de la crise, ni à celui de la mise en place de la réforme.
Á une semaine de la rentrée, une fois de plus les personnels sont appelés à se «débrouiller» pour l’accueil des élèves dans des conditions sanitaires sécures. Aucun dispositif précis pour les cours en atelier, alors que ceux-ci sont pourtant conséquents dans cette voie du lycée. Á en juger la circulaire de rentrée, la pratique professionnelle s’apprend en entreprise, lors des PFMP pour le ministre qui préconise d’y envoyer les élèves dès après la rentrée. C’est bien mal connaitre la réalité du terrain a fortiori avec les difficultés économiques que traversent les entreprises suite à la pandémie.
Sur le plan pédagogique, les moyens restent indigents et ne permettent pas de remédier aux retards accumulés et aux inégalités que la crise a mises en exergue tout particulièrement dans la voie pro. L’unique réponse consiste en une personnalisation à outrance des parcours des élèves après les tests de positionnement qui se généralisent à tou·tes les entrant·es en CAP et en BAC PRO. Les seuls moyens réellement dédiés sont une très forte augmentation des heures supplémentaires mobilisables jusqu’en décembre, ce qui risque fort d’entrainer l’annualisation et une remise en cause des statuts.
Pour les CAP, la possibilité d’un parcours en 3 ans sans aucun moyen supplémentaire est une gageure pour les enseignant·es et pour les établissements. Tout comme le sera l’accueil des jeunes en mal de contrats d’apprentissage alors que rien n’est prévu pour une augmentation des effectifs ou des sections.
Seule une mobilisation massive des personnels pourrait amener un changement de cap à cette politique mortifère des services publics et ultra libérale.
Les savoirs fondamentaux : une vieille recette qui perdure !
Et revoilà, cette année, les savoirs fondamentaux à l’honneur si on en croit la circulaire de rentrée !
En effet, il est possible, sur les 26 heures d’enseignements obligatoires hebdomadaires en 6e, de consacrer jusqu’à 5 heures à la remédiation en lecture, écriture ou calcul. Ce retour sur les fondamentaux est une vieille recette qui n’a jamais fait ses preuves.
En revanche, il aurait été nécessaire, comme nous le demandions, d’obtenir des moyens supplémentaires pour du soutien et des effectifs réduits. Cette décision ministérielle permet d’intensifier le développement des apprentissages fondamentaux déjà largement présents dans le premier degré et que nous dénonçons.
Pour la CGT Éduc’action, les personnels doivent refuser ce dispositif.
Direction d’école : une rentrée dans le flou
Pour mémoire, la loi sur la direction d’école a été votée le 24 juin dernier, à quelques heures de la fin de l’année scolaire. Si cette loi a été largement vidée par le ministre de nombreuses propositions néfastes des député·es, elle reste intolérable pour la CGT Éduc’action car elle introduit, avant tout, un lien hiérarchique entre les directeur·trices et les autres enseignant·es.
Souhaitant reprendre la main sur cette loi, le ministre s’était engagé à entamer des discussions avec les organisations syndicales au cours de l’été pour des mesures effectives dès la rentrée de septembre 2020. Mais à part une réunion le 2 juillet, nous n’avons rien eu, remaniement et vacances obligent…
À quelques jours de la rentrée, nous n’en savons pas plus des «grandes mesures» Blanquer pour les directeur·trices. Les principales annonces :
- Une aide administrative sous trois formes : 12 500 contrats civiques (contrats de de 6 à 12 mois), 900 AEd en pré-recrutement pour prendre en charge des petits groupes d’élèves et décharger de sa classe le·la directeur·trice, recrutement d’apprenti·es de niveau bac +2 dans le cadre de BTS et IUT spécialisés dans l’accompagnement administratif. Et vive la précarité ! Nous exigeons toujours des emplois statutaires et des personnels formés pour ces métiers. Et il va manquer du monde. Pour rappel il y a plus de 40 000 écoles…
- Les décharges : Rien! L’arbitrage final reviendra aux Dasen qui pourraient accorder des décharges complémentaires. Sans moyens supplémentaires à affecter ils devront « se débrouiller »…
- La revalorisation : une indemnité supplémentaire “exceptionnelle” est promise pour l’automne. On peut résumer par : « que du flou et pas de sous… »
- La formation : promesse de 2 jours de formation par an… le tout là aussi, sans moyens de remplacement supplémentaires et pas de capacité de remplacement des collègues…
Tout ceci reste très vague, non budgété et correspond à de simples pansements sur des plaies ouvertes. Rien n’améliorera les conditions de travail des personnels. Nous avons encore du travail à mener pour faire entendre nos revendications.
E3C + contrôle continu = opacité
Le premier semestre 2019-2020 a démontré la nocivité profonde de la réforme Blanquer du baccalauréat et du lycée : choix de spécialités pénalisant les élèves les plus fragiles socialement, mise en danger du groupe classe, programmes élitistes et trop lourds, dégradation des conditions d’étude des élèves et de travail des personnels…
Les luttes contre les E3C ont révélé le rejet de ce dispositif dans la communauté scolaire. Quant à l’utilisation du contrôle continu pour le baccalauréat, imposant aux jurys une harmonisation opaque, elle a démontré par l’absurde sa nocivité, dans le cadre actuel de l’École.
De tout cela, JM Blanquer n’en a cure.
La transformation des E3C en «évaluations communes» les rapproche encore plus du contrôle continu et loin de chercher à maintenir les groupes classes, elle engage la création de référent·es de spécialité autour du/de la professeur·e principal·e.
Le ministre persiste donc dans sa politique de baisse des moyens, de tri social et de concurrence entre élèves et entre établissements. L’imposition de 40% de contrôle continu au baccalauréat en fragilise le caractère national au bénéfice de la sélection via Parcoursup.
Plus que jamais, imposons l’abrogation de cette réforme et exigeons un lycée démocratique et émancipateur sans sélection à l’entrée de l’université.
Exigeons une rentrée digne !
La mise en œuvre de la «continuité pédagogique» du ministre n’a pu produire, dans la majorité des cas, qu’un maintien du lien des élèves avec les apprentissages. Le confinement a ainsi accentué les inégalités sociales et scolaires. Parallèlement, le virus circule encore ce qui nécessite distanciation physique et mesures sanitaires fortes. Il est donc d’autant plus impératif de rompre avec la logique comptable et réactionnaire actuelle.
L’École a besoin d’un collectif budgétaire et d’un plan d’urgence immédiat, permettant, dès l’automne :
- un recrutement massif d’enseignant·es afin de diminuer les effectifs par classe et de personnels de santé ;
- la mise en place de points d’eau, y compris temporaires, en nombre suffisants ;
- la gratuité des masques ;
- la réquisition de locaux permettant d’accueillir l’ensemble des élèves en petits groupes ;
- un allègement des programmes permettant de raccrocher les élèves en difficulté.
Plus globalement, cette crise est l’occasion d’exiger un autre système pour une autre scolarité permettant à l’ensemble des élèves de s’y retrouver. Pour cela, exigeons :
· Des moyens pour l’École
- une baisse d’effectifs par classes avec des maxima de 15 en maternelle, 20 en élémentaire, collège et bac pro, 24 en LGT ;
- plus d’enseignant·es que de classes et des moyens de remplacement suffisants ;
- des effectifs étoffés pour la vie scolaire ;
- une véritable médecine scolaire ;
- le renforcement du service social ;
- l’amélioration des conditions de travail des personnels administratifs, techniques, sociaux et des AESH.
· Des améliorations pour les personnels
- une hausse de salaire immédiate de 400€ mensuel pour tou·tes, la hausse de la valeur du point d’indice et une revalorisation de l’ensemble des grilles indiciaires avec un rythme d’avancement unique ;
- l’abandon des réformes des retraites et de la transformation de la Fonction publique ;
- la mise en place d’une véritable médecine de prévention ;
- la baisse généralisée du temps de travail.
· Une École démocratique et émancipatrice
- la fin de la logique de l’autonomie des établissements et de leur mise en concurrence ;
- une refonte urgente des programmes pour mettre fin à l’encyclopédisme et l’élitisme ;
- une orientation choisie pour les élèves et l’abandon de la sélection pour le supérieur ;
- l’arrêt des évaluations nationales ;
- le renforcement de l’éducation prioritaire avec une carte nationale comprenant les lycées, fixée sur des critères sociaux et avec des maxima réglementaires d’effectifs par classe.
Tout cela ne pourra se faire qu’avec un changement complet de la politique mise en œuvre par Jean-Michel Blanquer.
Exigeons l’abandon des réformes réactionnaires qui font toujours plus de l’École une machine de tri social fondée sur l’autoritarisme et la concurrence (réformes du baccalauréat et du lycée, de la voie professionnelle, de la formation des maîtres, loi Blanquer, loi ORE et Parcoursup…).